Marche blanche pour Cédric Chouviat, un an après sa mort sous les coups de la police

La mort de Cédric Chouviat le 3 janvier 2020 sous les coups de la police avait à l’époque suscité une vague d’indignation à travers tout le pays. Bien avant la mobilisation qui allait arriver l’été suivant autour des violences policières racistes et du mouvement #BlackLivesMatter, la mort de ce père de famille de 42 ans, alors qu’il effectuait son métier de livreur, avait pointé du doigt des zones d’ombres dans le fonctionnement de la police. Un an après les faits, une marche blanche en l’honneur de Cédric Chouviat était organisée à Paris.

Il avait voulu filmer ce qui n’était rien d’autre qu’un contrôle abusif. Rien de plus. Un de plus. Cédric Chouviat est mort lors d’un contrôle de police, dans des circonstances qui n’ont rien d’inhabituelles hélas. Comme nous le rappellent nos camarades de Bastamag, entre 1977 et 2020, “168 personnes sont mortes dans le cadre d’un contrôle d’identité ou de ses suites”, soit “23% des missions concernées”. 12% des victimes le sont suite à un “malaise” ou une “asphyxie”. Dans le cas de Cédric, c’est précisément cette thèse qui est avancée d’emblée à l’époque par la police.

J’étouffe”, ce furent les derniers mots enregistrés de Cédric - ou quand “I can’t breathe” trouve son écho dans les rangs de la Police Nationale.

Lors d’une conférence de presse à laquelle LaMeute avait assisté, sollicitée par Maître Arié Alimi avocat de la famille, Doria Chouviat l’épouse de Cédric avait résumé la situation ainsi :

Ce qui est dramatique c’est que l’histoire peut se répéter demain. C’est une histoire banale : quelqu’un à moto, qui se fait contrôler. Mon mari a bon cœur, c’est quelqu’un de formidable mais il est un peu gueulard. Je ne réfute pas l’hypothèse qu’il ait pu être insultant. Mais pour autant, ce qui lui est arrivé est disproportionné.
— Doria Chouviat, épouse de Cédric

Un an plus tard, la marche de commémoration de la mort de Cédric Chouviat débutait place de l’Uruguay dans le 16e arrondissement de Paris, ce dimanche 3 janvier, et s’est finie sur le quai Branly, lieu de l’interpellation qui entraîna la mort de Cédric. Cette marche a mobilisé environ 400 personnes malgré le froid glacial, parmi lesquelles plusieurs collectifs contre les violences policières ainsi que les familles de victimes des actions de la police. 

On a pu voir à la manifestation la famille de Cédric Chouviat bien évidemment, mais également les collectifs “Urgence notre police assassine", "Justice et vérité pour Babacar”, ou encore le collectif  “la vérité pour Adama” avec notamment Assa Traoré. Le collectif pour Gaye Camara ainsi que celui pour Ibo ont aussi fait des interventions et des prises de paroles durant la marche. Plusieurs personnalités à titre individuel étaient là aussi comme l’avocat Arié Alimi et le journaliste David Dufresne, connu pour ses signalements auprès de l’IGPN (Inspection Générale de la Police) avec le hashtag #AllôPlaceBeauveau.

Durant la marche, des slogans comme “Tout le monde déteste la police” ont été lancés et des actions de collages ont été entreprises par le collectif “Collage Féminicides Paris”.

La manifestation s’est déroulée dans le calme et la police s’est tenue loin des manifestant-es, à plusieurs centaines de mètres tout le long. La manifestation avait été appelée en amont dans une atmosphère pacifique, mais la préfecture de Paris avait quand même mobilisé la BRAV-M ainsi qu’un canon à eau ; une manœuvre bien peu pacifique de la part de la préfecture pour ce qui n’est ni plus ni moins qu’une simple marche blanche ayant pour but de se recueillir. Il faut sans doute y lire en sous-texte la paranoïa et le manque de discernement d’une préfecture de police qui panique dès qu’il se passe quelque chose à deux pas des Champs-Elysées. En fin de manifestation la BRAV a effectué des contrôles sur les derniers manifestant-es sans aucune raison apparente.

Ce qui est arrivé à Cédric Chouviat, et les connexions militantes qui se font dans la commémoration de sa mort ne font que confirmer une dynamique dans l’ensemble de la société française de ces dernières années. En effet, les violences policières ne sont plus un sujet ne concernant que les personnes racisées issues des quartiers populaires et/ou de l’immigration d’un côté, ou bien les mouvements sociaux de l’autre : les cas comme celui de Cédric Chouviat ou de Steve Maia Caniço démontrent que la dérive vers le tout-sécuritaire a généralisé l’usage de la force (et notamment létale) sur des portions plus larges de la population. Il faudrait également se poser une question : les images prises par Cédric au moment de sa mort seraient-elles interdites par la Loi de Sécurité Globale, et si oui, y aurait-il eu une “affaire Cédric Chouviat” ?

MERCI POUR VOTRE LECTURE

La réalisation de ce reportage a nécessité 2 personnes et environ 6h de travail cumulées.

- Photos : Tulyppe ;

- Texte : Graine, Tulyppe ;

- Mise en ligne : Graine.

Aucun bénéfice n’est tiré de cet article. Vous pouvez toujours nous soutenir via notre Tipeee en cliquant sur le lien ci-dessous.