Betek an trec'h

Gwengamp, ker eus breizh gant 6900 tud emañ e bro dreger, an aod ar mor, brudet eo hennezh gant he vogerioù, he skipailh fobal “ War-raok gwengamp” pe… Setu Gwengamp en deus degemeret an daou eus he poblañsoù an 29 a viz Mae 2021. Rak’ zo ur manifestadeg dija gant ar redadeg ha deuet eo ar manifestadeg ouzh ar c’huzul al Lezennoù peogwir o doa kontrollet 2 merkad eus al lezenn Molac.

Guingamp, ville de Bretagne de 6900 habitant.e.s située dans le pays du Trégor, côte d’Armor, connue pour ses remparts, son équipe de football , son “En avant Guingamp”… bref : Guingamp a accueilli le double de sa population le 29 mai 2021. La cause : une manifestation déjà prévue pour ar redadeg - une course à pied de relais à travers toute la Bretagne, qui sera amplifié par la venue des militant-es pour la défense des langues régionales et leur enseignement immersif.

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Petra zo ?

Pour comprendre la colère des bretonnant.e.s, il faut revenir sur la Loi du 21 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion ou “ Loi Molac' “ du nom du député Paul Molac qui en est à l’origine.

Celle-ci est donc déposé le 30 décembre 2019 puis examinée et adoptée par l’Assemblée nationale le 8 avril 2021 ( adoptée à 247 voix pour, 76 contre et 19 absentions). Sauf qu’une saisine est déposée auprès du Conseil Constitutionnel, quelques jours plus tard, le 22 avril 2021 ( signée par 61 députés LREM dont plusieurs qui l’avaient pourtant déjà adoptée). Le résultat est rendu le 21 mai 2021 avec la validation “ des dispositions relatives à la prise en charge financière par les communes de la scolarisation d'enfants suivant des enseignements de langue régionale “ mais censure “l’enseignement immersif de ces langues car il serait contraire à la Constitution qui dit que, article 2 “La langue de la République est le français (sic)'“ et que donc -d’après le CC- “l'usage du français s'impose aux personnes morales de droit public et aux personnes de droit privé dans l'exercice d'une mission de service public (…). L'enseignement immersif d'une langue régionale est une méthode qui ne se borne pas à enseigner cette langue mais consiste à l'utiliser comme langue principale d'enseignement et comme langue de communication au sein de l'établissement…Il est donc contraire à la Constitution (…)” et pour finir, “l’utilisation de signes diacritiques dans les actes de l'état civil” est elle aussi censurée sous le même article 2 de la Constitution…

Cette censure sous prétexte que la France parle français et c’est tout et dans la lignée de l’oppression que subisse déjà nos langues.

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Botoù-koad dre-dan

Déjà en 1902 sous la IIIème République, le breton était interdit dans les prédications, prônes et dans l’enseignement du catéchisme par l’anticlérical Emile Combes, président du conseil des ministres français ou encore Jules Ferry, ministre de l’instruction à ce moment, qui lors de sa loi de 1882 instaura l’école républicaine en langue française uniquement alors que les autres écoles non “officielles” étaient fermées. En effet, les enfants étaient punis s’iels se faisaient prendre à parler breton. Pire encore : les élèves punis devaient porter le “botoù koad”, un signe distinctif autour du cou parfois symbolisé par un sabot de bois. L’unique façon de s’en débarrasser était de dénoncer un autre enfant qui avait parlé breton, sous peine de devoir rentrer à la maison avec ledit sabot de bois autour du cou. On dit de cette période, que les lois interdisait le breton ainsi que de prononcer des insultes. On dit même qu’ il était alors interdit de cracher par terre.

Holl asambles e Gwengamp

L’Histoire et le temps ont fait peu à peu disparaître la langue bretonne du pays, pour qu’il ne reste aujourd’hui qu’environ 200 000 brittophones. L’INED (Institut national d'études démographiques) a fait une enquête à ce sujet en 2002 : “L’alsacien compte environ 548 000 locuteurs adultes, l’occitan 526 000, le breton 304 000, les langues d’oïl 204 000, le catalan 132 000, le corse 122 000, le platt lorrain 78 000 et le basque 44 000”.

Mais l’envie d’apprendre, elle, est toujours là. En Bretagne, l’enseignement immersif est majoritairement fait par les écoles Diwan depuis 1977, de la maternelle jusqu’au lycée. On peux également cité le travail des écoles Div Yezh pour le bilingue en breton dans les écoles public et Divaskell Breizh pour l’enseignement en breton (et le gallo) dans les écoles catholiques. De plus, des formations longues sont proposées pour celles et ceux qui souhaitent apprendre le breton en moins d’un an, comme les organismes Mervent ou Stumdi.

Le contexte étant posé, c’est donc plusieurs milliers de personnes qui se sont rassemblées a Guingamp (6000 selon la préfecture, 15000 selon les organisateurs). Les bretonez défilent dans les rues avec leur slogan “ 1 2 3 , brezhoneg e pep ti, 4 5 6 brezhoneg e pep lec’h, 7 8 9 brezhoneg atav !”.

Des jeunes, des plus âgées, des familles : la manifestation est intergénérationnelle et multilingue. On entend du breton, du français et même du gallo. Dans tout ce monde réuni, c’est la jeunesse qui donne le ton, iels sont étudiant.e.s, lycéen.ne.s, collégien.ne.s, de la fac à la maternelle à faire résonner leurs slogans dans tout Guingamp, brezhoneg betek an trec’h.

Met ‘drokfen ket evit teñzorioù ma Bro, ma Yezh ha ma Frankiz.
— Anjela Duval
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La réalisation de ce reportage a nécessité 2 personnes et environ 16h de travail.

- Texte et mise en page : Rabcor
- Relecture : Mes
- Photos : Rabcor